12/01/11 BARCELONA WORLD RACE : COMPRESSION AU POT AU NOIR OU EFFET ACCORDEON?

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12/01/11 BARCELONA WORLD RACE : COMPRESSION AU POT AU NOIR OU EFFET ACCORDEON?
Le Pot au Noir est bien là et son effet a été immédiat : les écarts ont diminué très sensiblement pour les six poursuivants qui bénéficiaient encore la nuit dernière d’alizés consistants, dépassant parfois les 20-25 nœuds. Jean-Pierre Dick et Loïck Peyron (Virbac-Paprec 3) sont bien dans le Pot au Noir, une zone de convergence qu’ils ont atteint en soirée mardi : le ciel s’est progressivement couvert, les grains sont devenus de plus en plus gros, le vent s’est calmé d’un coup pour se renforcer brutalement à 30-40 nœuds, des pluies diluviennes sont venues aplatir la mer… Bref toutes les caractéristiques des « doldrums » équatoriaux ! L’effet de tampon a permis à Michel Desjoyeaux et François Gabart (Foncia) de récupérer une trentaine de milles, et les cinq suivants au classement ont encore plus ramassé : Estrella Damm, Mapfre, Mirabaud, Groupe Bel et Neutrogena sont désormais à moins de 200 milles du premier !

Dit papa c'est quoi le pot au noir? Article de Dominic Bourgeois pour le Vendée globe
La Zone de Convergence Inter Tropicale, dénommée Pot au Noir par les navigateurs, est un lieu météorologique extrêmement variable tant dans son extension Est-Ouest que dans sa largeur Nord-Sud. Cette bande située entre le 8° et le 3° Nord se caractérise par son alternance de calmes et de grains violents, par sa couverture nuageuse et son fort taux d’humidité.
 
Certains disent que cette zone a hérité son nom de la jarre (le pot au noir) qui, dans les fermes capverdiennes, servait à recevoir les détritus de toute nature. D’autres laissent entendre que les négriers passaient par-dessus bord les esclaves malades pour éviter la propagation dans des espaces extrêmement confinés. Car dans les temps anciens, les navires n’avaient pas le potentiel des voiliers actuels et avaient bien des difficultés à manœuvrer rapidement et surtout à remonter contre le vent. Ils pouvaient passer des semaines entières, englués dans cette zone au point qu’ils devaient parfois se débarrasser des animaux du bord qui devenaient fous… D’ailleurs les Britanniques dénomment les régions tropicales « Horse Latitude » parce que les capitaines des navires bloqués par les calmes pendant de longues journées sous un soleil de plomb, se débarrassaient des chevaux qui consommaient beaucoup trop d’eau douce. Souvent dans le Pot au Noir, le scorbut commençait à décimer les équipages : manque de vivres frais, déficit en vitamines C, cette maladie a ainsi emporté les deux tiers des hommes de Vasco de Gama pendant son voyage vers les Indes en 1497-1498.
 
Pour les marins anglo-saxons, les « doldrums » (littéralement « dépression », « mélancolie ») étaient synonymes de fatigue extrême car pour se dégager de ces calmes prolongés, les équipages devaient tirer avec leurs chaloupes (à la rame !) les imposants bâtiments de Sa Majesté…

Les formes du Pot
Des pots, il y en a de toutes sortes : des grands, des maigres, des ballonnés, en cône, en poire, en tâche, en méduse tentaculaire, en ruban… Bref, sans vouloir tourner autour du pot, disons que cette bande nuageuse, dénommée par les météorologues Zone de Convergence Inter Tropicale (ZCIT), possède l’art de changer de forme et de fond. En fait, ce phénomène météorologique n’est que la conséquence d’un affrontement entre alizés de l’hémisphère Nord et alizés de l’hémisphère Sud, les premiers soufflant du Nord-Est, les seconds du Sud-Est. En sus, la proximité de l’équateur fait monter les températures de l’eau (27° à 29° C) et de l’air (35° à 40° C), générant une très forte évaporation et donc un taux d’humidité proche de 100%. Et qui dit vapeur d’eau, dit nuage… L’air chaud monte et plus il est haut, plus il se refroidit et les gouttelettes se transforment en pluie. Et le Pot est couvert…
Improbable Pot cible…
Et comme en plus, les anticyclones du Nord et du Sud « respirent » et que les nuages cumuliformes se déplacent et se régénèrent en permanence, ça bouge beaucoup dans le Landerneau équatorial ! Le Pot au Noir se métamorphose continuellement et comme le furet « un jour, il passera par ici, un autre, il passera par là ». Difficile donc pour les navigateurs de prévoir quelle est son extension et sa densité avant de l’aborder. Mais quelques principes simples indiquent qu’il est toujours plus étroit vers le 30° Ouest et plus long à traverser du côté du 20° Ouest. Il faut donc cibler son entrée dans le Pot pour concilier veine de vent favorable et trajectoire pas trop décalée dans l’Ouest, car après la ZCIT, ce sont des vents de secteur Sud-Est, donc au près, qui déportent les bateaux vers les côtes brésiliennes. Le meilleur « tunnel » pour traverser ce relief météorologique accidenté semble donc se situer entre le 27° et le 28° Ouest.
 
Le Pot au Noir est en fait plus actif lorsque les alizés sont forts, et plus étendu lorsque la température de l’eau est élevée : elle atteint au large de la Guinée-Bissau, 28° à 30° Celsius ! Cette chaleur de la mer provoque une très forte évaporation, donc la création de cumulonimbus qui peuvent s’étendre en altitude jusqu’à plus de 12 000 mètres… Sous ces nuages, la turbulence est très forte et les courants verticaux peuvent atteindre 15 à 30 m/s avec de fortes décharges électriques ; la visibilité est réduite, les pluies sont diluviennes, les rafales de vents violentes. Il peut même y avoir des trombes (colonne nuageuse se prolongeant jusqu’à la surface de la mer qui accompagne un tourbillon formé en dessous d’un cumulonimbus), des éclairs et du tonnerre, des feux de Saint-Elme (décharge électrique plus ou moins continue d’intensité modérée). Le Pot au Noir est la zone de genèse des dépressions tropicales qui peuvent se transformer, en se déplaçant vers l’Ouest, en cyclones…
Pot à terre, Pot d’enfer !
Dans le ciel, le Pot n’est pas toujours joli à voir, surtout dans le noir : des éclairs, du tonnerre, des pluies qui crépitent sur le pont comme sur l’arche de Noé, un horizon plombé, des variations de température importantes sous les grains (on passe de 40° à 25° sous les averses), des nuages blancs, gris, anthracites, noirs, parfois roses avec un rayon vert lorsque le soleil tombe dans les bras de Morphée… Les vents n’en font qu’à leur tête, variant constamment en force et direction, passant de 0 à 35 nœuds en quelques secondes au passage d’un grain. Même les meilleurs navigateurs avouent y perdre le Nord ! Le Pot au Noir s’aperçoit de très loin : à 100 milles (180 km), les marins voient déjà de grosses masses nuageuses au-dessus de l’horizon… Il se positionne en général entre le 3° et le 8° Nord partant de la côte africaine jusque parfois au 35° Ouest en se rétrécissant. Mais le pire avec le Pot au Noir, c’est qu’il reste imprévisible. Il s'étire, s'allonge, se rétracte ou grossit sans crier gare : le marin sait quand il commence à y entrer mais pas quand il va en sortir. Il peut durer quelques heures ou quelques jours !    Dominic Bourgeois
 
Classement au 12/01/2011 05:01:02
1- Virbac Paprec 3   2- Foncia à 39.5 miles    3- Estrella Damm à 126,1 miles   4- Mapfre à 177,2 miles   5- Mirabaud à 193,3 miles   6- Groupe Bel à 248,5 miles   7- Neutrogena à 262,8 miles   8- Renault ZE à 506,5 miles   9- Gaes à 508,4 miles ... FMC à 708,3 miles
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